Page:Balzac - Correspondance de H. de Balzac, 1876, tome 1.djvu/152

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
135
correspondance.

du tout. Je mourrai dans mon idée comme le soldat dans son manteau.

Immédiatement après la Physiologie, je fis, pour développer mes pensées et les jeter dans les âmes jeunes par de frappants tableaux, les Scènes de la Vie privée. Dans ce livre, tout de morale et de sages conseils, rien n’est détruit, rien n’est attaqué ; je respecte les croyances, celles même auxquelles je n’ai pas foi. Je suis simplement historien, conteur, et jamais la vertu ne fut plus vénérée et préconisée que dans ces scènes. — Maintenant, madame, s’il s’agit de la Peau de chagrin, je me défendrai contre vos accusations par un seul mot : cet ouvrage n’est pas destiné à rester seul ; il renferme, pardonnez-moi cette pédantesque expression, les prémisses d’un ouvrage que je serai fier d’avoir tenté, même en succombant dans cette entreprise, et, puisque vous avez pour moi tant de bonté, car je puis mesurer ce sentiment à l’étendue de votre sollicitude, qui m’a vivement touché, lisez la deuxième édition sous le titre de Romans et Contes philosophiques ; j’ai un peu avancé dans le plan. Un des meilleurs écrivains de notre époque[1] a bien voulu soulever le voile de ma pensée intime et future dans une introduction. Vous verrez là que, si parfois je détruis, j’essaye parfois aussi de reconstruire, Jésus-Christ en Flandre, l’Enfant maudit, Étude de femme, les Proscrits, les Deux Rêves, vous prouveront peut-être que je ne manque ni de foi, ni de conviction, ni de douceur ; je trace mon sillon consciencieusement. Je tâche d’être l’homme de mon sujet et d’accomplir

  1. Philarète Chasles.