Page:Balzac - Les petits bourgeois, tome 1, 1855.djvu/103

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des faubourgs Saint-Jacques et Saint-Marceau. L’homme fort, le génie aux abois, les pauvres honteux de la classe bourgeoise, il les retranchait du sein de la Charité. Chez tous les maniaques, le cœur ressemble à ces boites à compartiments où l’on met les dragées par sortes, le suum cuique tribuere est leur devise, ils mesurent à chaque devoir sa dose. Il est des philanthropes qui ne s’apitoyent que sur les erreurs des condamnés. La vanité fait certainement la base de la philanthropie ; mais chez le jeune provençal c’était calcul, un rôle pris, une hypocrisie libérale et démocratique, jouée avec une perfection à laquelle aucun acteur n’arriverait. Il n’attaquait pas les riches, il se contentait de ne pas les comprendre, il les admettait, chacun selon lui devait jouir de ses œuvres ; il avait, disait-il, été fervent disciple de Saint-Simon, mais il fallait attribuer cette faute à son extrême jeunesse, la société moderne ne pouvait pas avoir d’autre base que l’hérédité. Catholique ardent comme tous les gens du Comtat, il allait de très-grand matin à la messe et cachait sa piété. Semblable à presque tous les philanthropes, il était d’une économie sordide et ne donnait aux pauvres