Page:Balzac - Les petits bourgeois, tome 1, 1855.djvu/164

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choix. Cet honnête homme ne pouvait pas encore prendre sur lui de prier Minard de parler à cet égard pour lui. Phellion, l’homme de l’obéissance passive, était stoïque à l’endroit des devoirs, et de bronze en tout ce qui touchait la conscience. Pour achever ce portrait par celui du physique, à cinquante-neuf ans, Phellion avait épaissi, pour se servir du terme de la langue bourgeoise ; sa figure monotone et marquée de petite vérole était devenue comme une pleine lune, en sorte que ses lèvres, autrefois grosses, paraissaient ordinaires. Ses yeux, affaiblis, voilés par des conserves, ne montraient plus l’innocence de leur bleu clair, et n’excitaient plus le sourire, ses cheveux blanchis, tout avait rendu grave ce qui, douze ans auparavant, frôlait la niaiserie et prêtait au ridicule. Le temps, qui change si malheureusement les figures à traits fins et délicats, embellit celles qui, dans la jeunesse, ont des formes grosses et massives. Ce fut le cas Phellion. Il occupait les loisirs de sa vieillesse en composant un abrégé de l’histoire de France, car Phellion était auteur de plusieurs ouvrages adoptés par l’Université.