Page:Balzac - Les petits bourgeois, tome 1, 1855.djvu/34

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la cravate blanche à plis nombreux où le menton s’ensevelit et dont les deux bouts menacent les passants à droite et à gauche, en leur montrant un nœud passablement coquet, jadis fait par la main des belles. Tout en suivant les modes de loin, il les approprie à sa tournure, il met son chapeau très en arrière, il porte des souliers et des bas fins en été, ses redingotes allongées rappellent les lévites de l’Empire, il n’a pas encore abandonné les jabots dormants, les gilets blancs ; il joue toujours avec sa badine de 1810, il se tient cambré. Personne, à voir Thuillier passant sur les boulevards, ne le prendrait pour le fils d’un homme qui faisait les déjeuners des employés au ministère des Finances et qui portait la livrée de Louis XVI, il ressemble à un diplomate impérial, à un vieux préfet. Or, non-seulement mademoiselle Thuillier exploita très-innocemment le faible de son frère en le jetant dans un soin excessif de sa personne, ce qui, chez elle, était une continuation de son culte ; mais encore elle lui donna toutes les joies de la famille en transplantant auprès d’eux un ménage dont l’existence

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avait été quasi collatérale de la leur.