Page:Banville - Œuvres, Les Cariatides, 1889.djvu/118

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Dans vos colères de tigresse,
Vous m’avait fait des nuits d’ivresse
Où le plaisir, sous la caresse,
Pleure le râle de la mort,
Où toute pudeur se profane,
Où l’ange le plus diaphane
Se fait bacchante et courtisane
Et grince des dents, et vous mord !

Puis vous m’avez dit à l’oreille
Quelque étincelante merveille
Dont la mélancolie éveille
Les fibres de l’être endormi ;
Vous aviez la pudeur craintive
De la mourante sensitive
Qui renferme son cœur, plaintive
De n’être morte qu’à demi.

Et le doute railleur m’assiège
Lorsque, pris dans un divin piège,
Mon cou plus pâle que la neige
Est par vos bras blancs enlacé.
J’ai peur que le riant mensonge
Du lac d’azur où je me plonge
Ne soit l’illusion d’un songe
Qui tenaille mon front glacé.