Page:Banville - Œuvres, Les Cariatides, 1889.djvu/134

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Et comme j’admirais en moi ces traits si beaux,
Comme dans leurs linceuls les marbres des tombeaux
         Qu’on aime et devant qui l’on tremble,
Toutes deux, entr’ouvrant leurs lèvres à la fois,
Déployèrent dans l’ombre une splendide voix
         Et tout bas me dirent ensemble :

         Quoi ! parce qu’à ton premier jour
         Un désenchantement d’amour
         A secoué sur toi son ombre,
         Tu te laisses ensevelir
         Dans cet ennui qui fait pâlir
         Ton front sous une douleur sombre !
         Viens avec moi, viens avec nous !
         Nous avons des plaisirs sans nombre
         Que nous mettrons à tes genoux !

— Oh ! s’il en est ainsi, si vous m’aimez, leur dis-je,
Si vous pouvez encor pour moi faire un prodige,
         Rappelez l’amour oublieux !
Mais voici que la femme à blonde chevelure
M’entoura de ses bras, et, belle de luxure,
         Mit ses yeux brûlants dans mes yeux.