Page:Banville - Œuvres, Les Cariatides, 1889.djvu/20

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Hirondelles du ciel, sans peur d’être surprises
Vous pouvez faire un nid dans notre acanthe en fleur :
Vous n’y casserez pas votre aile, tièdes brises.

Ô filles de Paros, le sage ciseleur
Qui sur ces médaillons a mis les traits d’Hélène
Fuit le guerrier sanglant et le lâche oiseleur.

Bravez même l’orage avec son âpre haleine
Sans craindre le fardeau qui pèse à votre front,
Car vous ne portez pas l’injustice et la haine.

Sous vos portiques fiers, dont jamais nul affront
Ne fera tressaillir les radieuses lignes,
Les héros et les Dieux de l’amour passeront.

Les voyez-vous, les uns avec des folles vignes
Dans les cheveux, ceux-là tenant contre leur sein
La lyre qui s’accorde au chant des hommes-cygnes ?

Voici l’aïeul Orphée, attirant un essaim
D’abeilles, Lyæus qui nous donna l’ivresse,
Éros le bienfaiteur et le pâle assassin.

Et derrière Aphrodite, ange à la blonde tresse,
Voici les grands vaincus dont les cœurs sont brisés,
Tous les bannis dont l’âme est pleine de tendresse ;