C’est que la terre, hélas ! cet asile et ce havre
De plaines et de monts,
Venait, hier encor, d’engloutir un cadavre
De ceux que nous aimons ;
C’est qu’il faut ici-bas que l’heureuse promesse
N’ait pas de lendemain,
Et qu’il dort maintenant, l’ami plein de jeunesse
Qui nous serrait la main !
Il dort comme autrefois, mais c’est sous une pierre
Que fouleront nos pas,
Et la nuit l’enveloppe, et sa jeune paupière
Ne se rouvrira pas !
Et quand les fleurs de Mai fleuriront sous la glace
Pour une autre saison,
Sur la terre foulée et sur la même place
Renaîtra le gazon.
Alors tout sera dit. Parmi les rameaux d’arbre
Et les touffes de fleurs
Les regards du passant verront à peine un marbre
Taché de quelques pleurs.
Alors, sans y penser davantage, la foule
Aux regards effrayés
Suivra docilement le ruisseau qui s’écoule
Dans les chemins frayés.
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