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LES EXILÉS

Vers moi, souffle en délire, et s’est posé, farouche,
Avec l’essaim des mots sonores, sur ma bouche.
Muses, que l’Olmios charme par son fracas
Et dont on voit les pieds légers et délicats
Bondir autour de la fontaine violette
Où toujours votre Danse agile se reflète !
Vos chants ambroisiens, vierges aux belles voix,
Illustrent par des chœurs les triomphes des rois,
Et votre Hymne, éclatant comme un cri de victoire,
Vole et fait retentir au loin la terre noire.
Déesses, dont les pieds mystérieux et prompts
Glissent, et dont la Nuit baise les chastes fronts !
Vous dites le grand Zeus déchaînant sur la plèbe
Des Titans monstrueux les Dieux nés de l’Érèbe,
Puis enfermant au fond d’un cachot souterrain
Briarée au grand cœur dans un enclos d’airain ;
Et vous dites l’archer Apollon à l’épée
D’or, plantant ses lauriers sur la roche escarpée
Que leur feuillage obscur couvre d’un noir manteau,
Et foudroyant d’un trait la serpente Pytho,
Monstre énorme, sanglant, dont la force sacrée
D’Hypérion pourrit la dépouille exécrée.
Vous dites Lysios, nourrisson triomphant
Des Nymphes, enlevé sous les traits d’un enfant
Près de la mer, faisant par un prodige insigne
Sur le mât des voleurs croître et grimper la vigne,
Et, sur la nef rapide où coulait un vin doux,
Devenant un lion rugissant de courroux ;