fait vivre les moindres détails ; peintre, musicien, mosaïste inimitable ; mais surtout et avant tout, il a été ce faiseur de miracles qui tire de son sein une création durable ; il a été le poète. Y a-t-il un secret dans l’admiration universelle qu’inspire le chantre des héros dont Ésope est le père ? Je dis universelle, et jamais ce mot ne fut plus justement appliqué, car il est de vérité élémentaire que les œuvres du fabuliste plaisent aux pauvres déshérités qui font profession de haïr l’art des vers, autant peut-être qu’elles ravissent les hommes de pensée et d’imagination. Il n’est pas rare de voir les sots se passionner pour un bel ouvrage, parce qu’ils s’attachent seulement aux exagérations et aux traits de mauvais goût qui le déparent ; mais cette pâture grossière, jetée aux appétits de la foule, on ne la trouverait pas chez La Fontaine qui garde partout la noblesse et la sobriété du génie.
Que j’ai toujours haï les pensers du vulgaire !
s’écrie-t-il dans un mouvement sublime, et ce
mot est d’autant plus beau qu’il a le droit de le
prononcer sans forfanterie ; non-seulement il
hait les pensers du vulgaire, mais il ne pactise
jamais avec lui ; il le redoute, il l’éloigné, il s’en
sépare violemment et ne se plaît que là où est sa