Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 1.djvu/128

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reprit-il. — Vous êtes trop au-dessus des autres femmes pour blâmer une sincérité que vous avez invoquée. Je dis bien. Depuis longtemps Vellini n’est plus ma maîtresse. Nous avons rompu loyalement, d’un commun accord, entraînés l’un et l’autre par des sentiments nouveaux. Cela eut lieu bien avant que j’eusse rencontré mademoiselle de Polastron dans le monde ; mais si je disais que parfois l’habitude me repoussant chez une femme, autrefois aimée, je ne sois pas retombé pour une heure sous les brûlantes impressions du passé… oh ! alors, oui… je mentirais !

— Je comprends cette distinction et je l’admets, — dit la marquise, — mais ni pour Hermangarde ni pour le monde, elle n’est admissible. Avec ou sans amour, cette fille, mon ami, est toujours votre maîtresse. »

Et elle ajouta, avec un bon sens exquis et mûri à la pratique de la vie :

« Le mal, le danger sont bien moins ici dans les sentiments que dans la position.

— Vous avez raison, — dit Marigny, — mais la position est détruite. Le jour où M. de Prosny m’a rencontré dans l’escalier de Vellini, j’allais lui faire d’éternels adieux et lui dire que je ne la reverrais jamais.

— Et pourquoi n’avez-vous pas commencé par là, mon enfant ? — s’écria la marquise