Page:Barbey d’Aurevilly – Le Chevalier Des Touches, 1879.djvu/164

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cou pour en faire une écharpe. Mon autre bras n’en ira que mieux ; » et vous, sans vous faire prier davantage, vous l’ôtâtes de votre cou, mon innocente, et vous le lui donnâtes, tiède de vos épaules. Après les blessés, on s’occupa des armes. Ces armes, que nous avions cachées, et en réserve, dans ce château, tombé, à ce qu’il semblait, en quenouille, furent mises en état de bien faire. Une vingtaine de belles mains, parmi lesquelles il y avait les deux belles qui festonnent là-bas, sous cette lampe, monsieur de Fierdrap, se noircirent à faire des cartouches pour nos hommes. Nous étions à peu près, à ce moment-là, une quinzaine de femmes à Touffedelys. Quoique les Douze n’eussent pas réussi dans leur entreprise sur Des Touches, nous avions (l’inquiétude sur leur sort une fois passée et l’événement connu) repris cette gaieté qui nous revenait toujours après les catastrophes, et qui est peut-être l’obstination de l’espérance ! Toutes nous avions foi en nos héros. « Ils n’ont pas réussi hier, eh bien, ils réussiront demain ! » disions-nous, et chacune de vous autres, qui étiez plus femmes que moi, mesdemoiselles, retrouvait les rires et les légers propos de la jeunesse, au milieu de nos guerrières occupations.

Aimée elle-même, toujours sérieuse comme une reine, mais qui avait vu revenir de la pre-