Page:Barbey d’Aurevilly – Le Chevalier Des Touches, 1879.djvu/23

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pincée, tenait à la main une tulipe comme Rachel, la dame de carreau, et dont l’autre, brune, indolente, tigrée de mouches sur son rouge de brune, avait une étoile au-dessus de la tête, ce qui, avec le faire voluptueux du portrait, indiquait suffisamment la main de Nattier, qui peignit aussi avec une étoile au-dessus de la tête madame de Châteauroux et ses sœurs. L’étoile signifiait le règne du moment de la favorite. C’était l’étoile du berger royal. Le bien-aimé Louis XV l’avait fait lever sur tant de têtes, qu’il avait pu très-bien la faire luire sur une Touffedelys. Dans le panneau opposé, un portrait plus ancien, plus noir, d’une touche énergique, mais inconnue, représentait l’amiral de Tourville, beau comme une femme déguisée, dans son magnifique et bizarre costume d’amiral du temps de Louis XIV. Il était parent des Touffedelys. Des encoignures de laque de Chine garnissaient les quatre angles du salon et supportaient quatre bustes d’argile, recouverts d’un crêpe noir, soit pour les préserver de la poussière, soit en signe de deuil, car ces bustes étaient ceux de Louis XVI, de Marie-Antoinette, de madame Élisabeth et du Dauphin. Des fauteuils, en vieille tapisserie de Beauvais, traduisant les fables de La Fontaine, en double ovale, sur un fond blanc, égayaient de la variété de leurs couleurs et de leurs per-