Page:Barbey d’Aurevilly – Le Chevalier Des Touches, 1879.djvu/76

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vré… Le désastre de la Vendée, le massacre de Quiberon, la triste fin de la chouannerie du Maine, avaient été la mort de nos plus chères espérances, et si nous tenions encore, c’était pour l’honneur ; c’était comme pour justifier la vieille parole : « On va bien loin quand on est lassé ! » M. de Frotté, qui avait refusé de reconnaître le traité de la Mabilais, continuait de correspondre avec les princes. Des hommes dévoués passaient nuitamment la mer et allaient chercher en Angleterre, pour les rapporter à la côte de France, des dépêches et des instructions. Parmi eux, il en était un qui s’était distingué entre les plus intrépides par une audace, un sang-froid et une adresse incomparables : c’était le chevalier Des Touches.

» Je ne vous peindrai pas le chevalier… Vous le disiez, il n’y a qu’un instant, à mon frère, vous l’avez connu à Londres et vous l’y appeliez la belle Hélène, beaucoup pour son enlèvement, et un peu aussi pour sa beauté ; car il avait, si vous vous en souvenez, une beauté presque féminine, avec son teint blanc et ses beaux cheveux annelés, qui semblaient poudrés, tant ils étaient blonds ! Cette beauté, dont tout le monde parlait et dont j’ai vu des femmes jalouses, cette délicate figure d’ange de missel ne m’a jamais beaucoup charmée. J’ai souvent raillé sur leurs admirations enthousiastes mes-