Page:Barbey d’Aurevilly - Le Cachet d’onyx, Léa, 1921.djvu/95

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ou dames, blanches comme l’une des deux qui les regardaient de là-haut ; parées aussi comme si elles allaient à la fête ; exposées aussi, dans leurs vêtements de mousseline et leurs voiles de gaze, aux rigueurs acérées de l’atmosphère ; mais n’ayant l’air si joyeuses, ni si fières, car les fleurs qu’elles auraient pu mettre dans leurs cheveux où branlaient celles des deux autres au souffle du nord, elles en avaient couvert un cercueil.

Et cette vue prit le cœur des deux jeunes filles et le leur serra dans leurs seins transis. Elles inclinèrent la tête comme honteuses d’être lacées pour le plaisir quand une comme elles n’avait plus la taille prise que dans un linceul, et leurs têtes baissées semblaient vouloir jeter les fleurs dont elles étaient ornées sur la bière de la pauvre morte, comme un expiatoire hommage. Mais ces fleurs ne tombèrent point, hélas ! image des nos destinées, — et de la stérilité de nos chagrins.

Ce ne fut qu’un rêve et le temps d’un rêve, mais il ne faut qu’un rêve pour nous faire pleurer. Aussi les deux jeunes filles pleurèrent-elles par cette fenêtre longtemps après que dans la rue abandonnée rien ne bruissait, ne passait plus. N’est-ce pas bien là ce que vous m’avez raconté, madame, moins votre