Page:Barbey d’Aurevilly - Les Philosophes et les Écrivains religieux, 1860.djvu/193

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de M. Doublet pour appréhender l’idée, comme il dit, par exemple, l’idée de la ligne et de l’étendue, ils consistent dans des généralisations et des abstractions si multipliées, si difficiles et si incertaines, qu’avec un pareil système de recherche, Mathusalem lui-même serait mort sur la moitié du ba, be, bi, bo, bu, et nous ne croyons pas qu’il l’eût apprise. Philosophie d’école buissonnière, bonne pour les paresseux superbes ! Peu de gens ont le temps de se pencher ainsi sur eux-mêmes et d’observer les infiniment petits, — les fils de la Vierge intellectuels, — sur lesquels M. Doublet concentre apoplectiquement l’effort de son œil et de son cerveau. Dans cette vie, qui a un but sans doute, un but important et peut-être terrible, puisque c’est le tout de notre destinée, on a moins le temps d’apprendre comment se font les choses que le temps de les faire. Qu’on nous laisse passer avec notre ignorance ! la besogne presse. Mais ce n’est point le compte des philosophes. L’un veut deviner comment l’œil voit, et il se crève un œil ; l’autre comment l’épi devient tel, et il ne sème pas. Au moins le formica-leo prend des insectes nécessaires à sa vie en creusant son trou dans le sable, mais les psychologues, comme M. Doublet, dans quoi creusent-ils ? et que prennent-ils, que l’inanité ?…


III

Certes, quand on touche de pareils résultats, quand on lit ce livre laborieux dans le rien où l’abstraction met