Page:Barbey d’Aurevilly - Les Romanciers, 1865.djvu/129

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il n’a vu, comme les autres, que deux hommes, dont l’un trompe et l’autre est trompé ! Il n’a vu que l’abominable lutte du partage ! Il n’a pas vu enfin que là où il croyait deux hommes il n’y en avait qu’un en réalité, et que l’autre n’était pas un homme, mais la fonction sociale, cette chose auguste qui s’appelle la Fonction.

Or, qu’est-il arrivé de cette méconnaissance ? C’est que son livre n’a plus été qu’une vignette et une particularité. C’est qu’il n’a pas de conclusion, non-seulement exprimée, mais sentie, et qu’il ne s’adresse qu’aux honteux souvenirs, que nous avons tous, quand il devrait s’adresser, ce livre, encore plus à l’avilissement de nos idées qu’à l’avilissement de nos mœurs. Le génie a manqué à M. Feydeau, et c’est un livre de génie qu’il nous faudrait présentement sur l’adultère. Quand le génie manque, quelquefois la douleur travaille, mais elle ne peut pas le remplacer !

Elle a travaillé ici, c’est bien évident ; on sent sa présence et on entend sa plainte, mais hors cette plainte, qu’y a-t-il qui nous éclaire le cœur après nous l’avoir touché et, si vous y tenez, déchiré ?… On ne sait pas, de manière à n’en pas douter, même le sens que la douleur donne ici à sa plainte, et l’on se dit : Est-ce une vengeance et un pamphlet que ce livre ? Est-ce un testament ? Est-ce un remords ? Est-ce la réaction du repentir ? Le ton solennel y domine trop ; il y a trop de mélancolies d’étalage pour qu’on ne croie pas à quelque modulation de vengeance dans tout cela, mais, quant au droit, le droit n’apparaît dans cette fumée de larmes que sous la forme d’