Page:Barbey d’Aurevilly - Les Romanciers, 1865.djvu/236

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

s’est toujours tournée avec amour vers ce pays. Il a publié autrefois un livre qui eut son retentissement et qui s’appelle Rome souterraine. Historien, antiquaire, romancier, — car M. Didier veut être tout cela, — l’auteur des Amours d’Italie n’est donc pas sorti de ce qui fut à toute époque sa voie de préoccupation et d’étude. Dans son âge mûr comme dans sa jeunesse, il est resté fidèle à l’Italie. Malheureusement, l’Italia fara dà se n’est pas plus vrai en littérature qu’en politique. En littérature, l’Italie ne dispense pas d’avoir du génie quand on parle d’elle, et quand il n’y a qu’elle dans un livre, elle ne saurait donner à ce livre l’intérêt que le talent créé, car le talent seul fa dà se !

Non que M. Charles Didier manque de talent… ce n’est point là notre pensée, pas plus que ce ne serait la vérité. Mais son talent, que nous détaillerons tout à l’heure, et pour nous servir d’un mot dans le genre de son titre, n’est pas un talent d’Italie. L’Italie qu’il aime et qu’il a longtemps habitée ne l’a pas pénétré de son génie ; elle ne lui a pas doré l’esprit de son rayon. Il n’a pas été perméable aux influences de ce pays préféré, quoique de grands observateurs prétendent que les êtres ardemment aimés infusent de leur âme à ceux qui les aiment.

Intellectuellement, l’auteur des Amours d’Italie ne s’est pas italianisé… Sa nature forte, mais épaisse, a résisté et ne s’est pas fondue à l’air transparent que ne respirèrent jamais impunément, même les Barbares… Il a été moins heureux que Beyle, Beyle l’esprit sec et cruellement positif, le Voltairien, l’Américain, l’anti-poétique, et dont cette magicienne d’Italie