Page:Barbey d’Aurevilly - Premier Memorandum, 1900.djvu/30

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suis las de toujours noter le dégoût et l'ennui à chaque page et à chaque jour ! Mais c'est la vie comme elle est faite pour nous, radieuses intelligences, fiers et tristes, oh ! Tristes esprits ! — levé à huit heures. — baigné mes mains dans de l'eau de senteur. — pourquoi ne peut-on ainsi baigner sa pensée ? — lu les journaux. — déjeuné. — commencé la jolie comédie de clizia de Machiavel. La fable en est grecque, mais les mœurs en sont profondément italiennes. Les détails sont charmants de style et d'un immense esprit. — Guérin est venu. — j'ai fait ma toilette pour sortir.

Essayé les vêtements d'hier et les ai renvoyés. — pendant que je m'habillais, Guérin m'a lu le journal de sa sœur, cette pythonisse de la solitude, à laquelle je trouve trop de dieu dans le sein. Si cette fille-là avait souffert de passions réelles, si elle s'était ouvert l'intelligence par le monde comme elle l'a fait par les choses, que ne serait-elle pas, tandis qu'elle n'est qu'une admirable dévote, un fleuve dévoré par la terre à l'endroit même d'où il jaillit. C'est un parti si mélancoliquement pris que cette existence ! Cela fait mal parce qu'on sent que l'âme était là et que cette jeunesse