Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 1.djvu/337

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tion divine n’était pas plus pure que l’âme de ce prêtre qui parlait de pureté. Ils le connaissaient, et il faut aussi vous le faire connaître, avant d’aller plus loin dans cette histoire, car nous devons encore l’y rencontrer.

C’était un homme d’un âge peu avancé, qui avait apporté à l’autel des facultés plus faites pour le service de Dieu que pour celui des hommes, car au service des hommes elles brisent toujours celui qui les a. Il possédait une de ces natures délicates qu’on s’étonne toujours de voir vivre dans l’air épais de cette vie, tant elles sont organisées pour respirer l’air du ciel !

Né avec une imagination mélancolique et charmante, qui rappelait celle de Gray dans son Cimetière de campagne ou de Wordsworth dans sa délicieuse ballade Nous sommes sept, poète d’instinct et de génie, il avait, en devenant prêtre, commencé par jeter son génie dans la flamme de son sacrifice ; puis il y avait jeté son âme tout entière. Or, s’il s’était résigné à n’être jamais un grand poète, il trouvait plus amer et plus difficile de se résigner à n’être pas un grand saint.

Perdu pour toujours dans les soins d’une cure chrétienne et presque inamovible avec l’état des mœurs et des diocèses d’alors, il n’aurait jamais, comme saint Vincent de Paul,