Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 1.djvu/349

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les sens de cet homme complet valaient son intelligence :

— C’est toi, la Malgaigne, qui m’appelles ? dit-il. Attends, ma vieille mère, je descends !

Quelques secondes après, il ouvrait la porte vitrée du perron et descendait, un flambeau à la main.

— Ah ! dit-il joyeusement, car il sortait de faire une expérience dont il était content et il espérait — tu te décides donc à venir au Quesnay, ma vieille entêtée ?

Mais, avec un mot, la Malgaigne souffla sur sa joie :

— J’y viens, mais je n’y entre pas, fit-elle. Et toi, Jean, qui m’appelles entêtée, tu es plus entêté que moi !

— C’est toi qui m’as élevé, — répondit Sombreval avec ironie. — Il n’est plus temps de te plaindre de ton œuvre, la Malgaigne. Molle d’abord, l’argile devient dure, et la main qui l’a pétrie ne l’arrache pas du mur dont elle joint les pierres, une fois qu’elle y a séché.

— Mais les murs, même bâtis à la chaux, se renversent, — fit-elle presque irritée. Et pourquoi ne renverserais-je pas tout cet orgueil que j’ai bâti de mes deux misérables mains ?… Pourquoi, moi qui ai fait le mal et qui m’en repens, ne pourrais-je pas le réparer, en te ren-