Page:Barbusse - L’Enfer.djvu/101

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Puis le murmure lui-même se suspendit.

Peut-être, toujours serrés, s’étaient-ils mis à dormir loin l’un de l’autre ; peut-être étaient-ils partis, s’éblouir ailleurs de leur unique trésor.

L’orage, qui m’avait paru se taire, recommença, continua.

Longtemps, je lutte contre l’ombre, mais elle est plus grande que moi, elle m’ensevelit. Je m’abats sur mon lit, et je reste dans le noir et le silence. Je m’accoude, j’épelle des prières ; j’ai bégayé : De profundis.

De profundis… Pourquoi ce cri d’espoir terrible, ce cri de misère, de supplice et de terreur monte-t-il cette nuit de mes entrailles à mes lèvres ?…

C’est l’aveu des créatures. Quelles que soient les paroles prononcées par celles dont j’ai entrevu le destin, elles criaient cela au fond — et après ces jours et ces soirs passés à écouter, c’est cela que j’entends.

Cet appel hors de l’abîme vers de la lumière, cet effort de la vérité cachée vers la vérité cachée, de toutes parts il s’élève, de toutes parts il retombe, et, hanté par l’humanité, j’en suis tout sonore.

Moi, je ne sais pas ce que je suis, où je vais, ce que je fais, mais, moi aussi, j’ai crié, du fond de mon abîme, vers un peu de lumière.