Page:Barbusse - L’Enfer.djvu/106

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Elle a achevé de s’habiller. Elle a mis une jaquette de la couleur de sa jupe, laissant voir largement son corsage de lingerie dont le haut est transparent et rosé, tout au commencement et comme à l’aurore de son corps — et elle nous quitte.

Il se prépare à s’en aller, de son côté. La porte s’ouvre à nouveau. C’est elle qui revient ?… Non, c’est la bonne. Elle fait mine de se retirer.

— Je venais faire le ménage, mais je gêne Monsieur.

— Vous pouvez rester.

Elle manie des objets, ferme des tiroirs… Il a relevé la tête, il la suit du coin de l’œil.

Il s’est levé, il s’approche, maladroit, comme fasciné… Un piétinement, un cri qui s’étouffe dans un gros rire ; elle lâche sa brosse et la robe qu’elle tenait… Il la saisit par derrière, ses deux mains empoignent à travers le corsage les seins de la fille.

— Ah ! ben non, là, vrai, qu’est-ce qui vous prend !

Lui ne répond pas, la figure masquée de sang, l’œil fixe, aveugle ; à peine a-t-il laissé échapper un cri inarticulé : la parole muette où il n’y a que le ventre qui pense ; entre ses lèvres attisées, légèrement retroussées sur ses dents, un souffle de machine… Il s’est accroché à cette chair, le ventre sur cette croupe, comme une espèce de singe, comme une espèce de lion.