Page:Barbusse - L’Enfer.djvu/16

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Je m’apprête à allumer la lampe. Je frotte une allumette. Elle ne prend pas, le phosphore s’écaille, elle se casse. Je la jette, et, un peu las, j’attends…

Alors j’entends un chant murmuré tout près de mon oreille.

Il me semble que quelqu’un, penché sur mon épaule, chante pour moi, pour moi seul, confidentiellement.

Ah ! une hallucination… Voilà que j’ai le cerveau malade… C’est la punition d’avoir trop pensé tout à l’heure.

Je suis debout, la main crispée sur le bord de la table, étreint par une impression de surnaturel ; je flaire au hasard, la paupière battante, attentif et soupçonneux.

Le chantonnement est là, toujours ; je ne m’en débarrasse pas. Ma tête se tourne… Il vient de la chambre d’à côté… Pourquoi est-il si pur, si étrangement proche, pourquoi me touche-t-il ainsi ? Je regarde le mur qui me sépare de la chambre voisine, et j’étouffe un cri de surprise.

En haut, près du plafond, au-dessus de la porte condamnée, il y a une lumière scintillante. Le chant tombe de cette étoile.

La cloison est trouée là, et par ce trou, la lumière de la chambre voisine vient dans la nuit de la mienne.

Je monte sur mon lit. Je m’y dresse, les mains au mur, j’atteins le trou avec ma figure. Une boiserie pourrie, deux briques disjointes ; du plâtre s’est détaché ; une ouverture se présente à mes