Page:Barbusse - L’Enfer.djvu/280

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Elle l’écoutait dévotement, la bouche entr’ouverte, la tête légèrement renversée en arrière. S’il ne l’avait tenue, elle aurait glissé à genoux devant ce dieu aussi beau qu’elle. Déjà, elle avait les paupières meurtries de sa forte présence.

— Ton souvenir attristait mes joies ; mais il consolait mes tristesses.

Je ne savais pas lequel avait murmuré cela…

Ils s’embrassèrent violemment. Ils tourbillonnaient ; on eût dit deux flammes hautes.

Sa figure brûlait.

— Je te, veux… Ah ! pendant mes nuits d’insomnie et de désir, étendu, les bras grands ouverts devant ton image, comme ma solitude était crucifiée ! Sois à moi, Anna !

Elle voulait, elle voulait. Elle était, toute, un consentement radieux. Pourtant son regard défaillant considéra la chambre.

— Respectons cette chambre… murmura le souffle de sa voix.

Puis elle a eu honte d’avoir refusé. Elle balbutia tout de suite : Pardon !

Sa chevelure et sa jupe, dénouées, ruisselaient et glissaient autour d’elle.

L’homme, arrêté dans l’élan trouble de son désir, a considéré la chambre. Son front s’est froissé d’un pli de méfiance ombrageuse, sauvage, et dans l’œil a transparu la superstition de la race.

— C’est ici… la mort ?…

— Non, dit-elle, en se berçant sur lui.

Ce fut la première fois qu’il fut presque question du mort dans la simplicité de leur rappro-