Page:Barbusse - L’Enfer.djvu/81

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Les mains se désenlacent, les caresses se détachent et s’écroulent, la chair s’affale. Ils s’éloignent l’un de l’autre. Le mouvement l’a rejetée sur le côté du divan.

Lui, sur une chaise, la figure triste, les jambes ouvertes, le pantalon débraillé, halette lentement, souillé de toute la jouissance morte et refroidie.

Sa bouche est entr’ouverte, sa figure se contracte, les orbites et la mâchoire s’accusent. On dirait qu’en quelques instants il se soit amaigri et qu’on voie dans lui l’éternel squelette. Tout un effort douloureux et pesant s’exhale de lui. Il semble crier et être muet, au fond de la poussière du soir.

Et tous deux se ressemblent enfin au milieu des choses, autant par leur misère que par leur figure humaine !

… Je ne les vois plus dans la nuit. Ils y sont enfin noyés. Je m’étonne même de les avoir vus jusque-là. Il a fallu que l’ardeur tumultueuse de leurs corps et de leurs âmes mît sur leur groupe une sorte de lumière.

Où est donc Dieu, où est donc Dieu ? Pourquoi n’intervient-il pas dans la crise affreuse et régulière ? Pourquoi n’empêche-t-il pas par un miracle l’effroyable miracle par lequel ce qui est adoré devient brusquement ou lentement détesté ? Pourquoi ne préserve-t-il pas l’homme de l’endeuillement tranquille de tous ses rêves, et aussi de la détresse