Page:Barchou de Penhoën - Histoire de la conquête de l’Inde par l’Angleterre, tome 1.djvu/410

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un grand nombre de princes indigènes, de rejetons des anciens souverains dont la domination avait précédé de bien des siècles la conquête mogole. Les uns et les autres déléguaient leur autorité à un grand nombre de fonctionnaires, par les mains desquels ils administraient et gouvernaient. Puis, au-dessous de cette hiérarchie aristocratique et administrative se trouvait le village, sorte de municipalité, de république, dont l’origine se perdait dans la nuit des temps, et dont la constitution était demeurée invariable sous tous les gouvernements qui s’étaient successivement remplacés sur le sol de l’Inde ; le village présentait tellement peu de surface qu’il pouvait entrer dans les édifices politiques les plus différents, il avait assez de consistance pour ne pas être brisé dans leur chute. C’est ainsi que dans l’ordre physique les mêmes molécules intégrantes peuvent passer successivement dans les formes de cristallisation les plus variées. L’empire mogol était donc tout à la fois despotique par sa tête, aristocratique et féodal dans son milieu, municipal et républicain à sa base.

Le Mogol et l’Indou, ces deux peuples vivant sur le même sol, présentaient des contrastes moraux non moins étranges, non moins curieux. Les Indous professaient un panthéisme universel ; ils divinisaient la nature entière ; ils remontaient, par une chaîne non interrompue, du brin d’herbe ou du grain de sable qu’on foule aux pieds jusqu’au