Page:Barneville - Le Rythme dans la poésie française, 1898.djvu/48

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Ah ! ma fille, à ces pleurs laisse mes yeux ouverts ;
Mon deuil est raisonnable encore qu’il soit extrême ;
Et, lorsque pour toujours on perd ce que je perds,
La sagesse, crois-moi, peut pleurer elle-même.
En vain l’orgueil du diadème
Veut qu’on soit insensible à ces cruels revers ;
En vain de la raison les secours sont offerts,
Pour vouloir d’un œil sec voir mourir ce qu’on aime,
L’effort en est barbare aux yeux de l’univers,
Et c’est brutalité plus que vertu suprême.
Je ne veux point, dans cette adversité,
Parer mon cœur d’insensibilité
Et cacher l’ennui qui me touche ;
Je renonce à la vanité
De cette dureté farouche
Que l’on appelle fermeté ;
Et de quelque façon qu’on nomme
Cette vive douleur dont je ressens les coups.
Je veux bien l’étaler, ma fille, aux yeux de tous,
Et dans le cœur d’un roi montrer le cœur d’un homme.

Nous achèverons de goûter le vers libre en lisant La Fontaine.

La Fontaine, lui, a recours à presque tous