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BOUTEILLER ET LE PARLEMENT

Les pourparlers duraient, quand Renaudin vint apprendre à son patron que décidément le Général présentait Julien Dumas.

Lui, Portalis, on avait cru pouvoir le jouer ! Son appétit brutal et sa morgue se rejoignirent pour le convaincre de se faire respecter. Le même jour, à minuit, tandis que des membres du Comité National couraient chez Dillon chercher un arrangement, il brisa tout par un article intitulé : « Divorçons ».

Renaudin subit le premier effet de ces querelles. Portalis le prévint de se conformer à la ligne du journal, désormais anti-boulangiste. Le reporter, tout comme un autre, aurait eu avec plaisir de la dignité, car son café le surveillait ; il parla de démissionner. Il croyait que le patron l’admirerait et transigerait. Mais Portalis haussa les épaules. Et le lendemain, Girard l’avertit de se chercher une place pour la fin du mois. Cet incident clôtura net son boulangisme héroïque : « Tout le monde touche, se dit-il, je serais trop bête de marcher plus longtemps pour rien. »

Il chargea de ses intérêts Sturel. On lui obtint difficilement de Dillon une mensualité de cinq cents francs. Boulanger, à cette date, manquait d’argent. Nul joueur ne se soucie de ponter sur un moribond. Le comte de Paris, sous l’influence des conservateurs parlementaires opposés à l’idée plébiscitaire, voulait abandonner un aventurier qu’abandonnait la fortune. Et la duchesse d’Uzès, dont le caractère chevaleresque empêcha ce lâchage, parut, à cette minute, plus sentimentale que loyaliste : son rang seul atténuait la vivacité des critiques qu’un boulan-