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JOURNÉE D’AGONIE DE REINACH

Beaurepaire avait reçu le mot de Loubet l’invitant à suspendre l’action judiciaire et l’appelant place Beauvau. Cette lettre l’avait bouleversé ; elle ne contenait pas les seuls mots qui pussent rassurer le magistrat : « Je vous écris d’accord avec mon collègue de la Justice. » Il soupçonna un piège. Il n’avait plus que deux heures pour notifier les citations avant l’expiration de l’heure légale. Il s’avisa de réclamer plusieurs voitures où il installa ses huissiers munis de leurs copies et avec ordre de se tenir prêts devant la grille du ministère. Lui-même courut place Beauvau. M. Loubet n’était pas rentré. Il tarderait à peine quelques minutes, disait son chef de cabinet. À six heures, M. le procureur général fiévreux attendait toujours. L’heure légale était passée, les huissiers ne pouvaient plus instrumenter. À six heures un quart, M. Loubet, flanqué de M. Burdeau, reçut M. Quesnay.

Les « graves nouvelles d’Italie » signifiaient-elles quelque machine combinée là-bas par Reinach, baron italien, dans sa fugue de Monte-Carlo ? Le président du conseil avoua qu’il les avait inventées pour arrêter le départ des citations :

— Ne convenait-il pas de réfléchir avant d’accomplir un acte irréparable ?

M. Loubet parlait avec embarras. Enfin, appuyé par M. Burdeau, il demanda s’il était nécessaire