Page:Barrès – Leurs Figures.djvu/327

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
323
LA LIQUIDATION CHEZ STUREL

— C’est impossible, Suret-Lefort. Laissons cela.

— Je ne t’ai pas fait cette réponse quand tu as désiré que je prisse en mains l’affaire Racadot et les intérêts de Mouchefrin… Et tu oublies que, dans cette circonstance, Bouteiller s’est conduit d’une façon parfaite.

« Est-ce qu’il me menace ? » pensa Sturel, mais il ne put rencontrer le regard de Suret-Lefort.

Il répondit sèchement :

— Demande-moi un service personnel.

Suret-Lefort s’était levé :

— Je sollicite cette entrevue de la façon la plus pressante, comme un bon office pour moi-même. Je me suis engagé auprès de Bouteiller. Tu sais qu’il subsiste à Bar-le-Duc des suspicions contre mon républicanisme ; je serais un boulangiste déguisé. Mon amitié bien connue pour toi donne un semblant à ces bruits calomnieux. Bouteiller peut m’aplanir toutes difficultés électorales. Pourquoi me refuserais-tu une obligeance qui ne t’engage pas ? Et cette démarche d’un Bouteiller, après tout, ne sens-tu pas qu’elle te grandit ? C’est le fruit de la victoire avant la bataille engagée !

Sturel, depuis le début de ce dialogue, parlait comme il jugeait raisonnable, mais tout au fond de lui-même il désirait de voir Bouteiller furieux ou suppliant, de le connaître avec une face nouvelle. Il répéta :

— Ce m’est extrêmement pénible !