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LA LIQUIDATION CHEZ STUREL

luptés de sa jeunesse lui étaient restituées par la .pâleur dont elle était couverte. Ce bel état de faiblesse, ces mains tremblantes, ce tutoiement aussi lui arrachèrent ce cri de mélancolie :

— Qui aimez-vous maintenant, Thérèse ? Elle lui répondit bravement :

— Je vous ai aimé plus que tout au monde. Si vous effacez le nom de M. de Nelles, il consent à notre divorce et j’épouserai M. Rœmerspacher. Vous êtes le premier à qui j’en fais confidence, parce que mon bonheur dépend de vous.

— Soit, dit-il, accordant en une minute ce que toutes les insistances ne lui avaient pas arraché.

Sur le soupir d’une femme, voilà que ce vengeur de la morale publique n’obéissait plus qu’à son bon plaisir. En rougissant de son indélicatesse,

— mais l’indélicatesse, n’est-ce pas dans ces matières la coutume ? — il demanda :

— Depuis longtemps vous aimez Rœmerspacher ?

Elle répliqua sans baisser les yeux :

— Je puis bien vous dire, mon ami, qu’entre lui et moi il n’y a jamais rien eu à quoi un indifférent ne pût assister.

Suret-Lefort, en retrouvant les deux jeunes gens, chercha un instant s’il ne s’était pas mépris dans ses suppositions. Sturel tint à atténuer la démarche de son amie :

Mme de Nelles s’informe de mes intentions.