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un homme libre

les longues après-midi de soleil, en face de l’Océan qui fait mal aux yeux ! Ah ! ce thé dont nous abusâmes par engouement !

Un soir, au casino, nous rencontrâmes cinq camarades qui avaient bien dîné et qui riaient comme de grossiers enfants. Ils se réjouissaient à citer le nom familial de tel commerçant de la localité, et patoisaient à la jersiaise. Ils invitèrent le capitaine du bâtiment de Granville-Jersey à boire de l’alcool, puis ils parlèrent de la territoriale.

Ils furent cordiaux ; nos femmes leur plurent ; Simon n’ouvrit pas la bouche. Moi, par urbanité, je tâchais de rire à chaque fois qu’ils riaient.

Avant de nous coucher, mon ami et moi, seuls sur le petit chemin, près de la plage où se reflétait l’immense fenêtre brutalement éclairée de notre salon, dans la vaste rumeur des flots noirs, nous goûtâmes une réelle satisfaction à épiloguer sur la vulgarité des gens, ou du moins sur notre impuissance à les supporter.

« Ô moi, disions-nous l’un et l’autre, Moi,