Page:Barrucand - La vie véritable du citoyen Jean Rossignol.djvu/140

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chisseuses, nombreuses dans le canton, en moins d’un quart d’heure tous ces échalas en étaient arrachés. Ils étaient au moins quatre mille hommes et autant de femmes, qui vinrent sur nous. Quatre d’entre eux s’avancèrent, au nom de tous, et nous dirent fort impertinemment : « Il faut que vous nous donniez vos armes ainsi que vos munitions, ou bien que vous marchiez sur Versailles. Si vous ne voulez pas, nous allons vous pendre quatre à ces arbres au milieu du chemin. » J’avoue qu’aucun de nous n’avait envie de se laisser accrocher.

Nous nous rangeâmes en bataille et nous tenions toute la chaussée, car nous étions cent vingt-cinq hommes armés. Hullin nous dit : « Voyez ce que vous voulez faire. » Nous répondîmes, tous ensemble : « À Versailles ! à Versailles ! » Aussitôt des cris de « bravo » se firent entendre et de grands claquements de mains. Mais, chemin faisant, une grosse pluie dissipa tout le monde. Chacun entrait dans les cabarets, dans toutes les maisons, pour se mettre à l’abri du mauvais temps, et la moitié de notre troupe nous quitta pour prendre quelque nourriture, car aucun de nous n’avait vu un morceau de pain de toute la journée.