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Page:Barzaz Breiz 4e edition 1846 vol 2.djvu/338

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La fête de juin a lieu chaque samedi de ce mois, à quatre heures de l’après-midi.

En arrivant au lieu de la réunion, on voit circuler dans la foule un jeune homme plus beau, plus grand, plus endimanché que les autres, qui porte un nœud de rubans bleu, vert et blanc à la boutonnière : c’est le patron de la fête ; les couleurs de ses rubans, chose très-remarquable, étaient celles des druides, des bardes et des augures, pour lesquels elles étaient[1], comme dans la pièce qu’on va lire, l’emblème de la paix, de la sincérité et de la candeur.

Celui qui présidait la fête précédente a transmis son titre et sa charge au patron de la fête nouvelle, en lui accrochant par surprise, à la boutonnière, le nœud de rubans qu’il portail. Le nouveau patron se procurera de la même manière un successeur. En attendant, il choisit une commère, au doigt de laquelle il passe une bague d’argent ; puis ils ouvrent tous deux la danse, aux applaudissements de la foule.

Les paysans ont conservé un vague mais précieux souvenir de l’origine druidique de cette fête :

« J’ai entendu les anciens raconter, me disait un cultivateur des environs de la Feuillée, qu’autrefois, avant de venir danser, garçons et jeunes filles se réunissaient dans l’église de la paroisse, et qu’on y chantait vêpres. Les vêpres finies, on se rendait processionnellement, clergé en tête, au lieu convenu. Mais alors ce n’était pas comme aujourd’hui : le patron de la fête ne se contentait pas de porter des rubans bleus, verts et blancs à la boutonnière, il était habillé de ces couleurs de la tête aux pieds ; au lieu de notre costume brun des montagnes, il prenait, comme dans la plaine, la veste bleue et la braie blanche, avec la guêtre verte de certains cantons. Ce qu’il y a de plus singulier, c’est que les prêtres portaient les mêmes couleurs ; on va même jusqu’à prétendre que le recteur ouvrait la danse, et que le curé (le vicaire) jouait de la musique : il est vrai qu’il en jouait, dit-on, sur un instrument d’ivoire, ayant des cordes d’or ; mais je ne puis croire cela, car jamais aucun curé n’a fait le métier de sonneur (de ménétrier), excepté dans les contes. »

  1. William owen’s, bardism., p. 57, 59, 42.