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JOURNAL

grands morceaux. 1l y a déjà deux ou trois mois que j’ai besoin de cela ; avant, cela n’aurait servi à rien, mais je suis à point pour ce travail. Nous ne sommes que huit, les autres élèves, au nombre de vingt-deux, ont passé dans le nouvel atelier que Julian a arrangé, 51, rue Vivienne, et où l’organisation est comme dans notre ancien.

Mardi 2 novembre. Depuis une huitaine de jours, je me fais apporter mon déjeuner de la maison à l’atelier. On a organisé cela dans un machin en paille ou en jonc comme les troupiers. C’est bien plus raisonnable que de courir de la rue Vivienne aux ChampsÉlysées et de perdre les heures où le jour est le plus beau. De cette façon, je travaille de huit à midi et de une à quatre heures.

Mercredi 10 novembre. C’est horrible d’avoir travaillé sans cesse pendant trois ans pour arriver à découvrir qu’on ne sait rien ! Jeudi 11 novembre. —-Tony est venu et, comme je lui expliquais mon découragement, il me dit que cela prouve que je ne suis pas aveugle, et il m’engage à reprendre mon étude, à continuer d’étudier. Enfin, cela prouve toujours que j’en sais plus qu’avant, puisque j’y vois clair. Mais queille tristesse ! Comme j’aurais besoin d’encouragement ! Je me suis refait un manteau brun à capuchon de moine pour l’atelier, quand il m’arrive de prendre une place près de la fenètre, de laquelle il vient un vent d’enfer. Donc j’ai un capuchon de moine, ce qui m’a toujours porté malheur. J’ai pleuré sous ce capuchon de malheur et tant, que cette bonne Zilhardt, qui était venue voir si ce