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JOURNAL

Oh ! je ne l’aurai pas ; et c’est à cause de l’émotion de maman que ça m’embête. Je ne veux pas qu’on force la porte de mes affaires et qu’on partage mes sentiments. J’en souffre comme d’une impudeur. Que je sois en feu, ou en eau, ou en n’importe quoi, les autres doivent me laisser la paix. Et maman va s’imaginer que je souffre et ça m’exaspère. Il fait lourd et du brouillard ! J’ai la gorge serrée jusque dans les mâchoires et les oreilles. Sept heures trente cinq. On m’appelle pour diner. C’est fini.

Lundi 26 mai. Ça va mieux. Au lieu de cette attente lourde, je suis dans l’indignation. Or c’est un sentiment en dehors ou plutôt rafraichissant. On a voté hier vingt six troisièmes médailles, il en reste six à voter. M…, a sa médaille pour le portrait de Julian. Comment expliquer cetle aventure ? Car enfin on a récompensé des choses relativement mauvaises. L’injustice ? Je n’aime pas beaucoup cette raison, elle sied trop aux nullités. On peut aimer plus ou moins ma peinture, mais il est un fait qui s’impose, c’est que voilà sept enfants groupés et grandeur nature avec un fond qui est bien aussi quelque chose. Tous ceux dont l’opinion compte trouvent cela très bien ou bien ; il y en a qui disent que je n’ai pas pu faire ça toute seule. Jusqu’au vieux Robert-Fleury qui, sans savoir de qui est le tableau, le trouve très bien.

Et Boulanger qui dit à des tiers qu’il n’estime pas ce genre, mais que c’est fort tout de mėme et très intéressant. Et

puis ?… On a médaillé des núllités insignes !  ! Je sais bien