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journal de ma vie.

un chevaux-leger, nommé Beuseins, Bearnois, lequel luy dit qu’il tirat luy-mesme la sienne ; ce quy renouvela la noyse, quy fut en fin apaisée par la prudence de Mr de Crequy. J’y demeuray tout le lendemain, et la nuit aussy, pendant laquelle nous allames donner une allarme a ceux du chasteau, sondant leur fossé. Ils nous tirerent extremement et de mousquetades et de coups de canon : et comme les autres se fussent retirés par dessous la barricade par ou ils estoint entrés, j’en perdis la piste ; de sorte que je fus plus d’une heure a la mercy du feu du chasteau, a vingt pas du fossé. En fin Mr de Crequy, en peine de moy, envoya un sergent me chercher, que je fus bien ayse de trouver, et plus encores le trou de la sortie.

Je m’en revins le soir d’apres trouver Mr de Grillon, quy menoit le regiment des gardes à Chamberi, ou la nuit mesme nous gaignames les fausbourgs, et perçant les maysons, vinmes jusques contre la porte de la ville. Le roy y vint le lendemain a six heures du matin, et ayant fait sommer la ville, Mr de Jacob, quy en estoit gouverneur, vint parler de dessus la muraille a Mr de Villeroy[1], avesques lequel il capitula que, sy dans trois jours il n’estoit secouru, il rendroit au roy la ville et le chasteau de Chamberi, et que cependant le roy pourroit s’approcher jusques sur le fossé, et y planter mesme ses batteries. Le

  1. Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroy, fils de Nicolas de Neufville, seigneur de Villeroy, et de Jeanne Prudhomme, ministre et secrétaire d’État, servit sous les règnes de Charles IX, Henri III, Henri IV et Louis XIII, et mourut en 1617, âgé de 74 ans.