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journal de ma vie

tout ce ou son honneur ne sera point engagé et touché, et qu’il achetteroit l’honneur des bonnes graces de Mr le Prince au plus haut prix qu’elles se pourront acquerir ; mais qu’il me permette de luy dire aussy que l’amitié et le service d’un tel prince comme Mr de Guyse ne doit point estre maintenant negligée par Mr le Prince, a quy il a fait voir, par ce petit eschantillon, de quelle suitte et nombre d’amis il le pourroit un jour assister et servir ; et que, pour mon particulier, je luy suppliois tres humblement de me pardonner sy, en executant son commandement, je luy avois parlé avesques tant de franchise et de liberté. »

Il me respondit qu’il avoit trouvé bon, et fort bien pris ce que je luy avois dit, et qu’une grande partie estoit a considérer ; mais qu’il falloit aussy que les amis de Mr de Guyse, et ceux ausquels il avoit croyance, fomentassent plustost l’accommodement que la discorde, laquelle, en fin, leur pouvoit beaucoup plus nuire que profitter ; que nous avions desja obligé Mr de Guyse par nostre assistance ; que nous nous en devions contenter, et concourir a l’accord : ce que je luy asseuray que non seulement moy, quy estois en petite consideration parmy tant de princes, ducs, et officiers, quy l’assistoint, mais que tous ceux qu’il tenoit en quelque estime, et dont il se conseilloit en cette affaire, conspiroint a l’accord, et s’y portoint entierement.

Lors il me licencia, me priant de cooperer, en tout ce que je pourrois, en cet accord, et qu’il me remettroit bien en suitte avesques Mr le Comte ; dont je le remerciay tres humblement. Je prins donc congé de luy, et, en partant, il me dit que le marquis de Nar-