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journal de ma vie.

geolet arriva, quy me vint saluer, et luy ayant dit qu’il vint soupper avesques moy, s’en estoit excusé me disant qu’il estoit malade, ce que des capitaines dudit regiment me firent remarquer et me dirent qu’il estoit du party de Mr  d’Espernon.

Apres souper je me retiray pour escrire au roy et a la court, comme un des habitans me vint dire que Mr  le cardinal de Guyse seroit a l’heure mesme en mon logis pour y venir souper, qu’il me le mandoit, et qu’un des eschevins estoit allé querir les clefs pour luy ouvrir la porte. Or estoit il que le soir de devant que j’arrivay, ceux de la ville m’estoint venus porter les clefs a mon logis, et que n’ayant qu’a y demeurer un jour ou deux, je leur avois dit qu’ils les gardassent, qu’elles estoint en bonne main, et les leur fis rendre. Allors je m’apperceus de la faute que j’avois faite, et en mesme temps prins ce que j’avois de gentilshommes, dix Suisses, et le corps de garde quy estoit devant mon logis ; j’envoyay un nommé Baulac[1] lieutenant de Cominges[2] mettre sa compagnie en armes et la faire promptement marcher a la place, ou je courus, resolu de charger furieusement tout ce que je trouverois assemblé, comme je croyois estre trahy : mais je ne trouvay personne.

Je me ressouvins lors du lieutenant colonel, devant le logis duquel je passay, lequel je pense, sy je l’eusse trouvé sur pié, que je luy eusse fait mauvais party : mais je le trouvay au lit et mesmes sans chandelle a

  1. N. de Cassagnet, seigneur de Baulac.
  2. Cominges était capitaine au régiment de Champagne.