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1637. janvier.

Somme l’année precedente, m’avoit fait resoudre a ne l'importuner de ma vie, et de mourir plustost dans ma captivité que de me mettre encores en estat de souffrir de nouveaux affronts, mettant ma seule esperance en Dieu, et aux accidens quy me pourroint causer mon eslargissement. Mr le Prince neammoins, (lequel m'a fait durant ma prison beaucoup de graces par les tesmoygnages de sa bonne volonté, et du desplaisir qu’il avoit de mes longues souffrances, avec les asseurances qu’il m’a de temps en temps données que s’il voyoit lieu d’ayder a ma liberté par ses conseils et instances, qu’il le feroit avec soin et passion), me fit dire qu’il voyoit du jour a ma liberté, et que sy les affaires de Monsieur s’accommodoint, et qu’elles fussent suyvies d’une tresve generale comme l’on la pratiquoit avec espoir qu’elle pourroit reussir, que ma liberté (en ce cas) estoit asseurée, et qu’il m'en pouvoit respondre. Mais comme je ne me suis jamais imaginé que les Espagnols acceptassent une longue tresve, ny que le roy en accordat une courte, veu leurs differens interets, je n’ay point creu ma liberté par ce moyen, dont je voyois les causes sy eslongnées.

On me manda de Lorraine la continuation de la desolation de mon bien ; la retraitte de presque tous les habitans de la terre de Harouel dans le bourg et dans la mayson, lesquels la remplissoint de maladies et d'infections ; et la diminution a veue d'œil de la santé et de la vie de ma belle sœur avec laquelle je n’estois pas en fort bonne intelligence parce qu’elle ne vouloit pas que ma niece d’Espinal se mariat selon mon intention, et pour m’en empescher comme je luy eus trouvé un sortable party, elle ne voulut jamais me