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journal de ma vie.

ce dessein, veu la mauvaise opinion que l’on a desja d’elle sur ce sujet : Dieu m’a fait la grace d’avoir appris depuis, que ce bruit est faux, et qu’il n’a eu aucune pensée de cela.

Monsieur le chancelier arriva a Rouan le 4me de ce mois, le colonel Gascion y estant entré avec ses forces cinq jours auparavant. Le lendemain de l’entrée de monsieur le chancelier, il envoya une interdiction a la court de parlement, a la court des aydes, au bailliage, et aux tresoriers de France ; en suitte de quoy il fit faire plusieurs executions de ceux qu’il creut avoir trempé au trouble de l’esté precedent.

Salses avoit capitulé de se rendre la veille des Rois s’il n’estoit secouru. Mr le Prince se presenta le mesme matin pour tenter le secours : mais il fut jugé du tout impossible de le faire ; ce quy fut cause qu’Espenan en sortit avec la garnison le 7me de ce mois, quy fut neammoins heureux a la France en ce que la reine se trouva grosse de nouveau.

L’on chercha ce mesme mois divers moyens pour trouver de l’argent pour subvenir aux grands frais qu’il convenoit faire pour la guerre, entre lesquels celuy d’une nouvelle creation de seise maitres des requestes fut accepté et presenté au parlement pour le verifier et enregistrer. Mais les maitres des requestes ayans fait de fortes brigues, et le parlement ayant odieuse cette nouvelle creation, il fut refusé ; dont le roy se sentant offensé exila deux conseillers, Lainé et Scaron[1], et envoya a la Bastille le

  1. Jean Scarron, reçu conseiller au parlement le 10 février 1600, fut le père du poète Scarron. Ce dernier adressa des vers au roi au sujet de la disgrâce de son père.