Page:Bastiat - Proudhon - Interet et principal, Garnier, 1850.djvu/125

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— Eh bien ! puisque vous ne comprenez pas la sublime clarté des contradictions, je vais condescendre à votre ignorance et vous prouver ma thèse par la méthode des distinctions. Il y a du jour qui éclaire et du jour qui n’éclaire pas.

— Je ne suis pas plus avancé.

— Il me reste encore pour ressource le système des digressions. Suivez-moi, et je vous ferai faire du chemin.

— Je n’ai pas à vous suivre. J’ai prouvé qu’il fait jour ; vous en convenez ; tout est dit.

— Vous ressassez toujours même assertion et mêmes preuves : vous avez prouvé qu’il fait jour, soit ; maintenant, prouvez-moi qu’il ne fait pas nuit.

Cela est-il sérieux ?

Quand un homme se lève, et, s’adressant au Peuple, lui dit : Le moment est venu où la Société te doit le Capital gratis, où tu dois avoir des maisons, des outils, des instruments, des matériaux, des approvisionnements pour rien ; quand un homme, dis-je, tient ce langage, il doit s’attendre à rencontrer un adversaire qui lui demande quelle est la nature intime du Capital. Vous aurez beau invoquer la contradiction, la distinction et la digression, je vous ramènerai au sujet principal et essentiel. C’est mon rôle ; et peut-être, est-ce le vôtre de dire que je suis un ignorant opiniâtre et que je ne sais pas raisonner.

Car enfin, pour qu’il y ait entre nous une divergence si profonde, il faut bien que nous ne nous entendions pas sur la signification de ce mot : Capital.

Dans votre lettre du 17 décembre, vous disiez : « Si la peine du créancier est zéro, l’intérêt du créancier doit devenir zéro. »

Soit. Mais il en résulte ceci :

Si la peine du créancier est quelque chose, l’intérêt doit être quelque chose.

Prouvez donc que le temps est venu où les maisons, les outils, les provisions naissent spontanément. Hors de là, vous n’êtes pas fondé à dire que la peine du capitaliste