Page:Baudeau - Première Introduction à la philosophie économique.djvu/202

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accomplis par les mandataires de l’autorité souveraine : ils sont eux, leurs propriétés personnelles, mobiliaires ou foncieres, l’objet direct et prochain de ces travaux ; c’est à eux qu’instruction, protection, administration sont dues par la souveraineté, non seulement à titre de justice, puisque les mandataires de l’autorité sont payés pour ces fonctions ; mais encore à titre de sagesse, puisque le patrimoine de la souveraineté, ses richesses, sa puissance, ne sont pas moins proportionnels à l’exactitude qu’on met à remplir ces fonctions, que l’aisance et le bien-être de toutes les autres classes et des individus qui les composent. C’est ce droit direct et immédiat à l’instruction, à la protection, à l’administration, qui caractérise le citoyen. L’étranger est l’homme qui vit sous l’influence directe et immédiate d’une autre autorité ; mais c’est toujours un homme : ses propriétés, ses libertés n’en sont pas moins ses propriétés et ses libertés à lui. Son travail quelconque dans l’une des trois classes de la société à laquelle il appartient, n’en concourt pas moins au maintien, à la perfection d’un des trois arts qui font la propagation et le bien-être de l’humanité ; ce travail n’en contribue pas moins à l’entretien de la masse générale d’objets propres aux jouissances utiles et agréables, qui font vivre notre espece, et qui rendent sa vie douce, son existence commode. Cet homme n’est point ennemi quand il n’usurpe aucune propriété, quand il ne viole aucune liberté ; car la véritable inimitié consiste précisément dans ce caractere d’usurpation et de violation, qui porte avec lui sa réprobation de par la nature, de par le jugement évident de la raison, et le sentiment irrésistible de la conscience. N’est-il pas étrange que des hommes, même éclairés, et capables d’instruire les autres ou du moins présumés l’être, se soient persuadés, aient fait croire à tant de peuples et à tant de générations, que les usurpateurs de leurs propriétés, les violateurs de leurs libertés étoient leurs associés et leurs amis ; que des hommes innocents et paisibles qui s’occupoient à l’autre bout du monde uniquement de leur propre bien être, sans avoir jamais pu troubler le leur, étoient leurs ennemis ? Quelque bizarre et funeste que soit cette idée, le prétendu droit des gens arbitraire et versatile qu’on a cherché mal-à-propos dans des principes autres que celui de la loi naturelle, en a fait naître une seconde plus absurde encore et plus désastreuse.