Page:Baudeau - Première Introduction à la philosophie économique.djvu/94

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des travaux de ce genre, et les simples ouvriers ou manœuvres qui operent sous leurs ordres.

Le chef fait les avances ou les préparatifs de la fabrication, il en court les risques, il l’ordonne et la dirige par son art ; le simple ouvrier exécute et reçoit son salaire.

Cette distinction peut être naturelle et avantageuse, mais elle peut être factice et nuisible, c’est ce qu’on doit considérer.

On sait désormais ce qu’il faut entendre par une distinction avantageuse ou nuisible. La premiere est celle qui opere la multiplication des jouissances, l’amélioration des objets qui procurent notre [178] bien être, l’autre est celle qui diminue cette somme des jouissances, cette masse des objets propres à nous les procurer.

Or, il est sensible que les objets sont façonnés beaucoup mieux, à moins de frais, d’une maniere plus prompte et moins variable dans un grand attelier, pourvu par avance de matieres premieres, de grands et forts instruments, sous la direction d’un très habile maître, qu’ils ne le sont en petit par un simple ouvrier dépourvu d’arts et de moyens.

C’est donc un bien réel quand il s’éleve un chef qui sait, qui veut et qui peut opérer en grand, même dans les manufactures qui n’ont pour objet que le façonnement des subsistances.

Prenons pour exemple l’art le plus utile de tous, celui qui nous fournit l’aliment le plus commun et le plus indispensable, l’art de la boulangerie.

La différence est énorme pour l’épargne des frais de tout genre, comme lo[179]cations de magasins, manutention, mélange et assortiment des farines, frais de fabrication, cuisson et débit du pain, entre une grande boulangerie dirigée par un seul chef riche, honnête et habile, et la cuisson que fait une pauvre femme particuliere, ou même un pauvre ouvrier sans avances, dont le débit est très borné ; l’un peut vous donner du pain excellent à beaucoup meilleur marché ; l’autre ne peut se procurer à soi-même, ou vous vendre que du pain très médiocre et fort cher.

C’est la force des avances, la bonne qualité qui résulte de la conservation et de la combinaison des farines, l’ensemble et la continuité des opérations, l’efficacité des bonnes et grandes machines, qui procurent ces avantages réunis du bon prix et de la qualité supérieure.

C’est le manque de moyens, de local, d’instruments et de direc-