Page:Baudelaire - Salon de 1845, 1845.djvu/5

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effrontées dégoûté le bourgeois de ces utiles guide-ânes qu’on nomme comptes rendus de salons[1].

Et tout d’abord, à propos de cette impertinente appellation, le bourgeois, nous déclarons que nous ne partageons nullement les préjugés de nos grands confrères artistiques qui se sont évertués depuis plusieurs années à jeter l’anathème sur cet être inoffensif qui ne demanderait pas mieux que d’aimer la bonne peinture, si ces messieurs savaient la lui faire comprendre, et si les artistes la lui montraient plus souvent.

Ce mot qui sent l’argot d’atelier d’une lieue devrait être supprimé du dictionnaire de la critique.

Il n’y a plus de bourgeois, depuis que le bourgeois — ce qui prouve sa bonne volonté à devenir artistique, à l’égard des feuilletonistes — se sert lui-même de cette injure.

En second lieu le bourgeois — puisque bourgeois il y a — est fort respectable ; car il faut plaire aux frais de qui l’on veut vivre.

Et enfin, il y a tant de bourgeois parmi les artistes, qu’il vaut mieux en somme, supprimer un mot qui ne caractérise aucun vice particulier de caste, puisqu’il peut s’appliquer également aux uns, qui ne demandent pas mieux que de ne plus le mériter, et aux autres, qui ne se sont jamais doutés qu’ils en étaient dignes.

  1. Citons une belle et honorable exception, M. Delécluze dont nous ne partageons pas toujours les opinions ; mais qui a toujours su sauvegarder ses franchises, et qui sans fanfares ni