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RUE PRINCIPALE

Pour la première fois depuis bien des jours, Ninette se sentait entièrement heureuse : elle en oubliait Bob et toutes les craintes qu’une scène probable lui inspirait encore quelques minutes auparavant. Elle tendit franchement, spontanément la main à René Lamarre.

— Bonsoir et, encore une fois, merci ! Tenez, si je n’étais pas si timide je vous embrasserais sur les deux joues. Je suis tellement heureuse !

— Vous allez me faire le plaisir de mettre votre timidité de côté. Et puis tout de suite ! Allons !

— Comment vous voulez… vous voulez que… ?

— Mais je l’exige à présent ! Il ne fallait pas en parler, ma chère enfant ! Allons, plus vite que ça !

Il tendit la joue avec une moue d’enfant gâté ; Ninette laissa fuser une vocalise de rires, lui mit les deux mains sur les épaules et, gamine, lui planta deux baisers sonores sur les joues. Puis, rapide, légère, elle ouvrit la portière et s’élança sur le trottoir.

— Bonsoir ! cria-t-elle.

— Bonsoir ! À demain !

Le roadster fit un bond en avant tandis que Ninette cherchait sa clef parmi les mille-et-trois objets qui encombraient son sac à main. La sensation de n’être pas seule la fit se retourner brusquement.

— Bonsoir, dit la voix grave de Bob.

— Ah ! c’est toi. Tu m’as fait peur.

— Tu ne t’attendais pas à me voir, n’est-ce pas ?

— Non, Bob, évidemment. Figure-toi que…

— En voilà une belle heure pour rentrer ! interrompit-il brusquement.

— Mais il n’est pas si tard, Bob, et puis…

Encore une fois il lui coupa brusquement la parole :