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ARSÉNIUS.

les de logique [1]. J’ai vu des professeurs bien embarrassés lorsqu’on leur faisait ces objections, qui, dans le vrai, ne doivent passer que pour des chicaneries inventées mal à propos par des gens de trop de loisir, mais qui ne prétendaient pas, comme Héraclite, qu’en effet une même chose soit et ne soit point. Ils n’avaient en vue que de donner de l’exercice à leur esprit. Notez qu’Aristote ne croit point que si Héraclite a dit cela, il l’ait néanmoins pensé : Ἀδύνατον γὰρ ὁντινοῦν ταὐτὸ ὑπολαμϐάνειν εἶναι καὶ μὴ εἶναι, καθάπερ τινὲς οἴονται λέγειν Ἡράκλειτον. οὐκ ἔςι γὰρ ἀναγκαῖον, ἅ τις λέγει, ταῦτα καὶ ὑπολαμϐάνειν [2]. Impossibile namque est quempiam idem putare esse et non esse, quemadmodùm quidam Heraclitum dicere arbitrabantur. Non enim necesse est quæcumque quis dicat, ea etiam putare.

(D) Il n’a pu trouver la raison d’une expérience, pour l’explication de laquelle il s’est tourmenté inutilement. ] Cette expérience est que le bois plus léger que l’eau ne se soutient pas néanmoins sur l’eau à l’égard de toute son épaisseur. Une poutre qui flotte dans une rivière est en partie sous l’eau, et en partie au-dessus de l’eau. On ne saurait expliquer cela selon les principes ordinaires de la pesanteur et de la légèreté : de là viennent les vains efforts d’Arriaga [3]. Les nouveaux philosophes ne trouvent là aucun embarras. Voyez le système de M. Gadrois.

  1. Sect. V, subsect. III et IV, pag. 19, et seq. edit. Parisinæ, an. 1639.
  2. Aristot. Metaphys., lib. III, cap. III, pag. 667. G.
  3. Arriaga, Disputat. IV de Generat., sect. V, de Elementis, subsect. VI, pag. 519.

ARSÉNIUS, diacre de l’église romaine, illustre par la noblesse de sa famille, mais beaucoup plus par sa vaste érudition et par sa piété, fut choisi pour être envoyé à l’empereur Théodose, qui cherchait un précepteur à son fils Arcadius. Ce fut le pape Damase qui fit ce choix. Arsénius arriva à Constantinople l’an 383. Il y fut très-bien reçu par l’empereur, qui se fâcha même un jour, et contre le disciple, et contre le maître, parce qu’il avait vu celui-ci debout, et l’autre assis, pendant la leçon. Il ordonna que son fils, quoiqu’il l’eût déjà déclaré Auguste, se tînt debout et découvert quand Arsénius l’instruirait, et quittât en ce temps-là les marques de la dignité impériale. Arsénius, employant toute son industrie à élever son disciple aux sciences et à la vertu, se crut obligé d’ajouter enfin le châtiment aux censures. Le jeune Arcadius en fut si outré, qu’il pria un de ses officiers de le défaire de son précepteur [a]. L’officier en avertit Arsénius, qui prit le parti de se retirer secrètement, et de s’en aller dans les déserts de l’Égypte. Il y passa un fort grand nombre d’années, avec les solitaires de Sceté, dans les exercices de la plus fervente et de la plus austère dévotion. Il y mourut à l’âge de quatre-vingt-quinze ans (A). Théodose, qui apprit avec regret la retraite d’Arsénius, le fit chercher partout, sans le pouvoir découvrir [b]. Il y a quelques fautes dans le Dictionnaire de Moréri qui concernent cet article (B). J’en ai trouvé aussi quelques-unes dans d’autres écrivains (C).

On trouve plusieurs actions, et plusieurs sentences d’Arsénius, parmi les Apophthegmata Patrum, que M. Cotelier a publiés dans ses Ecclesiæ græcæ Monumenta [c].

  1. Tiré des Annales de Baronius, à l’an 383., num. 22, 23. Il cite Métaphraste sous le 8 de mai, et Surius, sous le 19 de juillet.
  2. Fléchier, Histoire de Théodose, pag. 273, 274.
  3. Voyez-en le premier volume, imprimé à Paris, en 1677.