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ATTILA.

gonie, a fait une Vie d’Attila, beaucoup plus ample que celle que Callimachus Experiens avait faite. Il la composa pendant qu’il était conseiller de Marie d’Autriche, reine de Hongrie, gouvernante du Pays-Bas. Vous y voyez la harangue que fit Attila à son armée avant la bataille de Châlons. Toutes sortes de lieux communs entrent dans cette harangue, comme on le peut voir par les notes marginales. Sambucus a inséré cet ouvrage d’Olahus, et celui de Callimachus Experiens, dans son édition de Bonficius. Le sieur Otrokocsi[1], qui a publié un livre sur l’origine des Hongrois, a parlé fort amplement d’Attila, et il s’est principalement servi de la relation de Priscus, qui avait accompagné les ambassadeurs que Théodose envoya à ce roi des Huns, l’an 448. Il tire de cette relation plusieurs remarques, pour faire voir qu’Attila était un fort honnête homme : il n’oublie point les reproches que ce prince fit faire à l’empereur Théodose, sur ce que l’eunuque Chrysaphus avait voulu engager Edecon, député d’Attila à la cour de Théodose, à tuer son maître. Ce député fit semblant de s’y engager, et se fit promettre une grosse somme d’argent, et puis il découvrit le tout à Attila. L’argent fut porté, la trame fut avérée : le roi des Huns s’en plaignit à Théodose en grand homme, et un air qui rend probable ce qu’on dit de sa débonnaireté pour ceux qui se soumettaient, et de la fidélité de sa parole. Supplicibus propè ad mollitiem facilis, et qui in fidem semel receptos, in perniciem usque suam tueretur [2].

(F) On a débité qu’il eut l’ambition d’établir sa langue, et de l’élever sur les ruines de la romaine. ] J’ai lu ce fait dans un ouvrage d’Alcyonius. On y fait dire ces paroles à Jean de Médicis, qui a été le pape Léon X. In bibliothecâ nostrâ asservatur liber incerti auctoris græcè scriptus de rebus à Gotis in Italiâ gestis. In eo memini me legere Attilam regem, post partam victoriam tam studiosum fuisse Goticæ linguæ propagandæ, ut edicto sanxerit ne quis linguâ latinâ loqueretur, magistrosque insuper è suâ provinciâ accivisse, qui Italos goticam linguam edocerent[3]. Vous verrez dans l’article de l’empereur Claude[4] quelques recueils concernant le zèle de plusieurs princes pour la langue de leur pays.

  1. C’est un ministre protestant fugitif de Hongrie, son pays. Son livre intitulé Origines, Hungaricæ, a été imprime à Franeker, in-8o., l’an 1693.
  2. Callimachus Experiens.
  3. Petrus Alcyonius, in Medico legato posteriore, folio h iij verso.
  4. Remarque (A).

ATTILIUS, poëte latin, a vécu, selon toutes les apparences, au commencement du VIIe. siècle de Rome. Volcatius Sedigitus lui a donné le cinquième rang parmi les dix poëtes comiques. C’était pourtant un mauvais auteur : son style était dur comme le fer [a], non-seulement selon le goût de Cicéron, mais aussi selon le goût de Licinius, qui n’avait pas à beaucoup près l’oreille aussi délicate que Cicéron. La traduction de l’Électre de Sophocle par Attilius ne valait rien : cependant Cicéron la jugeait digne d’être lue [b]. Suétone remarque qu’on en tira quelques endroits, pour les chanter pendant la pompe funèbre de Jules César, à cause qu’ils pouvaient être appliqués aux assassins de cet empereur [c]. C’est en vain que Casaubon et Torrentius ont changé ce passage de Suétone (A). Ils n’ont fait que donner un exemple des désordres que la critique peut quelquefois apporter.

  1. Voyez la remarque (I) de l’article Accius, au commencement.
  2. Voyez la même remarque.
  3. Sueton., in Cæsar, CLXXXIV.

(A) Casaubon et Torrentius.... n’ont rien éclairci touchant Attilius, en changeant un passage de Suétone. ] Casaubon ayant trouvé dans tous les exemplaires de Suétone, ex Electrâ