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AURÉLIEN.

naire ne s’appliquât pas à les détruire. J’avoue qu’on met sous son règne l’une des persécutions de l’Église ; mais il y a des historiens qui n’en font aucune mention, et ceux qui en parlent conviennent qu’elle fut courte [a]. Ne finissons point, sans observer une distinction que fait Vopiscus, et que peu de gens savent faire (M) : Telle fut la fin d’Aurélien, dit-il [b], prince plus nécessaire que bon. Ce que l’Angeloni raconte de quelques pièces de marbre qui furent trouvées sous le pontificat d’Urbain VIII, lorsqu’on aplanit l’endroit où Aurélien avait fait bâtir un temple sur le mont Quirinal [c], est fort propre à donner une grande idée de la magnificence de cet édifice.

  1. Voyez Tillemont, Hist. des Empereurs, tom. III, pag. 1085 et suiv.
  2. Hic finis Aureliano fuit, principi magis necessario quàm bono. Vopisc., in Aurel., cap. XXXVII.
  3. Francesco Angeloni, Historia Augusta, da Giulio Cesare infino à Costantino il Magno. illustrata con la verità delle antiche medaglie, pag. 332.

(A) On ne sait pas bien où il naquit. ] Vopiscus, ayant rapporté trois opinions [1], ajoute qu’il arrive ordinairement que la patrie de ceux qui sont nés dans un chétif lieu est inconnue. Il en donne cette raison, c’est qu’ils mentent sur ce sujet, afin de se rendre recommandables à la postérité par l’éclat du lieu natal. Evenit quidem ut de eorum virorum genitali solo nesciatur, qui humiliori loco nati, plerique solum genitale confingunt, ut dent posteritati de locorum splendore fulgorem [2]. Je crois qu’il y a une autre chose qui contribue encore plus à cela, je veux dire la multitude des lieux qui se veulent faire honneur d’avoir produit les hommes illustres. On se prévaut de l’incertitude du fait, on espère de ne pouvoir pas être solidement réfuté, on avance donc sans preuve et par vanité qu’ils sont nés en tel et tel lieu. De là vinrent les disputes sur la patrie d’Homère [3]. J’accorde à Vopiscus que l’importance est, non pas de savoir d’où sont les grands Princes, mais de savoir comment ils ont gouverné : Nec tamen magnorum principum virtutibus summa sciendi est, ubi quisque sit genitus, sed qualis in republ. fuerit. Néanmoins comme nous sommes naturellement fort curieux de savoir le temps et le lieu de la naissance des grands hommes, je crois qu’un historien est obligé à faire toutes les recherches possibles pour contenter là-dessus tous ses lecteurs, et que l’on a droit de se plaindre de la négligence d’une infinité d’écrivains qui n’ont pas pris cette peine.

(B) Il faisait observer la discipline avec la dernière sévérité. ] Ajoutons à cela qu’il eut le bonheur de voir que cette sévérité ne cabra point les soldats, et qu’elle ne fit que leur donner une crainte qui les empêcha de sortir de leur devoir. Ce fut sans doute un bonheur, car les généraux ont quelquefois autant de sujet de craindre les suites d’une trop grande sévérité, que celles d’une trop grande mollesse. Celui-ci se trouva très-bien de punir rigoureusement et sans rémission. Militibus ità timori fuit, ut sub eo posteaquàm semel cum ingenti severitate castrensia peccata correxit, nemo peccaverit. Solus deniquè omnium militem qui adulterium cum hospitis uxore commiserat, ita punivit, ut duarum arborum capita inflecteret, et ad pedes militis deligaret, eademque subitò dimitteret, ut scissus ille utrinque penderet. Quæ res ingentem timorem omnibus fecit [4]. Vous voyez dans ces paroles latines que, pour punir un soldat qui avait commis adultère avec la femme de son hôte, il se servit du même supplice qui fut employé par Alexandre pour punir le traître Bessus, qui avait

  1. Ortus, ut plures loquuntur, Sirmii, familiâ obscuriore ; ut nonnulli, Daciâ Ripensi. Ego autem legisse memini auctorem, qui eum Mæsi genitum predicaret. Vopiscus, in Aurel., cap. III.
  2. Idem, ibidem.
  3. Voyez la remarque (A) de l’article Rotterdam.
  4. Vopisc., in Aureliano, cap. VII, pag. 434.